L’île de Saint-Barthélémy qui il n’y a pas si longtemps était simple commune de la Guadeloupe deviendra au premier janvier 2012 un Pays-territoire d’outre-mer. Ce cheminement vers une autonomie et des responsabilités grandissantes ressemble beaucoup à ce que propose le Cippa pour la Guadeloupe; Un projet économique et politique dont nous avons publié une synthèse la semaine dernière ( lire l’article daté du 3 février 2011). Les deux îles ont des problématiques de développement et de ressources très différentes. Mais l’expérience des autres est toujours utile. Dans le journal de la collectivité, le président de ce qui est encore la Com de Saint-Barthélémy a évoqué le statut de PTOM et les avantages qu’il représente – notamment au niveau douanier – pour son île. Nous le reprenons sur Perspektives. – Le Conseil Européen réuni à Bruxelles s’est prononcé en faveur de l’évolution statutaire en PTOM de l’île de Saint Barthélemy à compter du 1er janvier 2012. Quel est votre sentiment quant à cette conclusion ?
– Bruno MAGRAS, Président de la Collectivité . Je me réjouis naturellement de l’adoption de cette décision à l’unanimité des Chefs d’Etat ou de Gouvernement des pays membres de l’Union Européenne qui composent le Conseil Européen.
Elle vient couronner tous les efforts entrepris pour doter Saint-Barthélemy d’un statut européen qui soit en cohérence avec l’autonomie dont nous disposons déjà en droit national
depuis notre évolution en COM du 15 juillet 2007, et de pouvoir adapter ainsi localement le droit européen dans le strict cadre des domaines dans lesquels la Collectivité est compétente.
Je note par ailleurs qu’il s’agit d’un choix logique pour un territoire comme le nôtre, qui dans certains domaines de compétences, jouit de la spécialité législative puisque tous les DOM (Départements d’Outre-Mer) français font partie des Régions Ultra-Périphériques de l’Union Européenne, et que la quasi-totalité des COM (Collectivités d’Outre-Mer) de la République bénéficient du statut de PTOM, à l’image de Saint-Pierre-et-Miquelon, la Polynésie Française, la Nouvelle Calédonie, Wallis-et-Futuna, ainsi que Mayotte, car c’est ce statut qui est le mieux adapté à leur degré d’autonomie.
J’observe également que le contenu de la décision du Conseil Européen balaye les tentatives de désinformation de la population menées par les quelques démagogues qui ont tenté de jouer sur les peurs. Ainsi, le texte de la décision rappelle clairement que, je le cite : « dans le cadre de ce nouveau statut, les citoyens de Saint-Barthélemy demeureront des citoyens de l’Union européenne et jouiront au sein de l’Union des mêmes droits et libertés que les autres citoyens français tout comme l’ensemble des citoyens de l’Union continueront d’y bénéficier des mêmes droits et libertés qu’actuellement ».
– La Collectivité, à l’issue de l’évolution en PTOM, va notamment bénéficier de la compétence douanière. A quels changements concrets, au quotidien, peut s’attendre la population ? Et quand seront-ils effectifs ?
– BM : En conservant le statut de RUP (Région Ultra Périphérique), nous prenions un risque majeur : celui de perdre définitivement notre statut de Port franc hérité de la période suédoise, du fait de l’application du Code des Douanes Communautaires modernisé qui supprime la notion d’extraterritorialité de Saint-Barthélemy et Saint-Martin.
A partir du 1er janvier 2012, devenue PTOM, la Collectivité va hériter de plein droit de la compétence douanière comme le prévoit la loi organique qui a érigé la commune de Saint-Barthélemy en COM, ce qui nous permettra de conserver notre statut de port franc, de définir des normes douanières adaptées à nos importations et surtout de ne pas nous voir imposer des directives européennes souvent inadaptées à l’exiguïté de notre territoire et à son isolement géographique. Ceci étant, la Douane gardera une compétence pleine et entière pour tout ce qui relève de l’application des pouvoirs régaliens de l’Etat en particulier dans les domaines de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le trafic des stupéfiants.
En outre, sur présentation de dossiers bien ficelés, Saint-Barthélemy pourra bénéficier des aides attribuées par l’Union européenne aux PTOM dans le cadre du Fonds européen de développement (FED), qui sont destinées notamment à des travaux routiers ou à des projets
d’aménagement urbain.
De plus, avec ce statut de PTOM l’île de Saint-Barthélemy deviendra un territoire associé de l’Union Européenne, ce qui implique que ses habitants conservent la citoyenneté européenne et à ce titre la liberté de circulation, comme nous l’avons évoqué plus haut, mais également le droit de vote aux élections européennes, ainsi que le droit de vote aux élections locales et européennes pour les citoyens européens résidant sur notre île.
– A la suite de cette décision du Conseil Européen, quelles sont désormais les dernières étapes avant le 1er janvier 2012 ?
– Conformément à la décision du Conseil Européen, les instances de l’Union Européenne vont procéder prochainement à une modification des traités afin de retirer Saint-Barthélemy de la liste des RUP et de l’intégrer à la liste des PTOM à compter du 1er janvier 2012.
Le Gouvernement français, en concertation avec la Commission, devra également préparer les mesures nécessaires pour assurer la transition de l’actuel régime européen de Saint-Barthélemy vers le nouveau, afin d’éviter tout risque d’insécurité juridique, tout en assurant la continuité du régime monétaire car l’Euro continuera naturellement d’être utilisé à Saint-Barthélemy, par le biais d’une convention monétaire entre la France et l’Union Européenne qui sera établie dans les mois à venir.
La Commission Européenne était également attachée à ce que la France souscrive aux engagements nécessaires à l’application à Saint-Barthélemy, des règles relatives à la lutte contre la contrefaçon monétaire, à la lutte contre la circulation illicite des capitaux et contre le blanchiment ainsi qu’à la coopération administrative et à la transparence fiscale, ce que nous avons d’ores et déjà fait avec la signature le 14 septembre dernier de l’accord entre l’Etat et la Collectivité concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale. Ce qui a indéniablement joué en la faveur de la décision prise par le Conseil Européen le 29 octobre dernier.
– Le titre est de la rédaction de Perspektives,
L’entretien a été publié dans « COM Saint Barth n°5, l’actualité de votre collectivité », janvier – février- mars 2011