José Navas, danseur d’origine venézuélienne vivant à Montréal nous invite à pratiquer un optimisme modéré: « La paix existe, dit-il, c’est une chose qui va et vient … » Il faut être vigilant pour la préserver au moins dans nos vies personnelles. Message positif en ce mois d’ao ût 2016 alors que des menaces diverses pèsent sur le monde : conflits, crise économique, crise climatique, terrorisme et risques de retour aux pires des replis identitaires. Cet article est paru sur le site form-idea.com que nous remercions.
Le Canada est peut-être le seul pays au monde, avec sans doute la Nouvelle-Zélande, o๠les bienfaits de l’immigration ne sont pas remis en cause actuellement. Même si on peut questionner la véritable motivation politique du gouvernement fédéral à promouvoir le multiculturalisme, le résultat est plutôt positif dans le domaine artistique.
José Navas illustre bien cette génération d’artistes néo-canadiens. Chorégraphe d’origine vénézuélienne, formé à New York, il a choisi Montréal comme lieu de résidence o๠il a fondé sa société de danse qui contribue ainsi au rayonnement culturel de la métropole québécoise.
A ma question s’il n’était pas fatigué du conflit, de la division ou disons de la sensibilité linguistique montréalaise, il me répond que bien au contraire, comme en Belgique o๠il jouit d’une certaine popularité, les lieux de frictions linguistiques sont en même temps des endroits qui vibrent intellectuellement, il y existe une grande créativité culturelle orientée vers les arts contemporains. Contrairement à ce que le monde anglophone pourrait penser, Montréal est une ville ouverte : Navas peut penser en anglais, créer en espagnol et travailler en français. Lorsqu’il enseigne la danse, il le fait le plus souvent dans la langue de Shakespeare puisque c’est dans cette langue qu’il a appris à danser à Manhattan, sans que cela pose le moindre problème.
New York lui a révélé le go ût de la danse. Par chance, il a bénéficié de l’enseignement du grand Merce Cullingham qui lui a transmis des techniques dont le concept d’abstraction qui l’a immédiatement séduit. Par sa discipline et son talent, José Navas est devenu une sorte d’ange de la danse. Son corps toujours souple et sensuel ne s’use guère, il s’exerce chaque jour mais sa danse se développe désormais autour du yoga o๠il puise son énergie. On ne peut s’étonner alors que Navas ait dansé pour la paix qui est loin d’être un concept utopique, selon lui :
» La paix existe bien, c’est une chose qui va et qui vient, dont nous devons rester vigilants pour qu’en tant que collectif nous comprenions qu’il y a un équilibre que nous pourrions dénommer » paix « . Il se peut qu’il y ait de multiples formes pour d’autres personnes mais selon moi, la paix est bien réelle et cela me donne espoir. »
La danse lui permet aussi de dominer ses émotions face à la descente aux enfers de son pays natal, le Venezuela, o๠il n’est pas retourné depuis des années. Mais Navas garde espoir, ce pays qui a touché le fond ne peut que remonter et la nouvelle chambre législative, o๠l’opposition au régime bolivarien est désormais majoritaire, laisse entrevoir des jours meilleurs.
Etonnamment, Navas ne s’identifie plus à son pays, il est fier d’être montréalais et canadien, car il a pu épouser son compagnon, Robert Leckey, doyen de la faculté de droit de la prestigieuse Université McGill.
A partir de cet automne, José Navas commencera une nouvelle tournée en solo, Rites, incluant Le Sacre du Printemps, au Canada, en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas. Il travaille aussi cet été à la création de Winterreise (Voyage d’hiver) en collaboration avec les musiciens du quintette à vent Pentaèdre.
NDLR
(1) Pierre Scordia de nationalité franco-canadienne enseigne le français à l’University Collège à Londres. Il est historien de formation.