Deux informations concernant l’Islande, petit pays de l’Atlantique nord devrait retenir notre attention. En 2014 l’Islande a été retenue comme étant le pays le plus pacifique au monde par l’institut pour l’économie et la paix (1); et en 2015 ce même pays a décidé
d’interrompre son intégration à l’euro et à la communauté européenne. Allez savoir pourquoi !
« Small is beautiful – pour une société à la mesure de l’homme ». Le titre du livre publié en 1973 par l’économiste britannique Ernst Schumacher pourrait s’appliquer à ce que vivent les Islandais en 2015. Le gouvernement de centre droit a adressé le 12 mars un courrier à la commission européenne indiquant que » l’Islande n’est plus pays candidat à l’euro, ni à l’intégration européenne. » Ce petit pays-île de l’Atlantique nord, adossé au cercle polaire, préfère garder sa monnaie ( la couronne) et son autonomie face à l’Europe.
Il ne faut pas en tirer de conclusion trop rapide. Le cas islandais est spécifique. Le pays compte 320 000 habitants et connait la plus faible densité de population de tous les pays européens avec 3 Islandais au Km2. 99% de l’électricité provient de l’énergie hydraulique et de la géothermie, une vraie autonomie énergétique donc. Ses principales activités sont l’agriculture et la pêche. L’Islande est un micro pays, une sorte de « nain économique » face à la puissance européenne et de cette faiblesse il tente de faire une force. Son cas mérite réflexion quand on vit sur un petit territoire comme la Guadeloupe.
L’Islande était pourtant à genou en 2008 lors de la crise financière. Le gouvernement de droite alors au pouvoir ( la gauche lui a succédé puis le centre droit) avait laissé les banques du pays se lancer dans de dangereuses stratégies financières qui les ont conduites à la catastrophe et vers une dette de plus de 3,8 milliards d’euros. Selon l’économiste Paul Krugman, l’Islande a pu faire face à cette crise en dévaluant sa monnaie et favorisant les exportations, si le pays avait été dans la zone euro, cela n’aurait pas été possible. Cette dévaluation plus un régime de réduction des dépenses assez drastique permet au pays de relever la tête aujourd’hui et de dire non à l’Europe.
Puis il y a les quotas de pêche, si importants pour l’économie du pays. En 2010, l’Islande a relevé ses quotas contre l’avis de l’union européenne. En restant à la marge de l’Europe le pays conserve son pouvoir de décision porté, il faut le dire, par une vague montante eurosceptique et nationaliste que les péripéties grecques n’ont fait que renforcer. En 2010, 93% de la population a rejeté le plan de remboursement de la dette islandaise.
Quelques uns voient dans le choix islandais une forme d’égoïsme : » on s’en sort, alors laissez nous faire à notre guise … »; d’autre un acte courageux. La vérité est s ûrement ailleurs, dans une forme de pragmatisme qui n’a rien d’une « révolte anti-européenne ». David Gunnlaugsson le premier ministre islandais a déclaré au lendemain du 12 mars que » ne pas adhérer ce n’est pas rompre les relations avec l’Europe à laquelle nous restons attachés par les valeurs et les liens historiques. »
L’Islande reste dans l’espace Schengen, dans l’EEE ( espace économique européen) et dans l’Otan, mais elle conserve son pouvoir de décision sur quelques points stratégiques pour elle. Pas fous les Islandais. » Le pays a comme atout une réelle cohésion sociale, une population très diplomée, dotée d’une forte capacité de travail » observe un connaisseur du pays.
Son personnel politique ne manque pas de vision, ni toujours, de pragmatisme. Si certains s’inquiétent du réchauffement de la planéte et de la fonte des glaces, d’autres y voient en Islande une opportunité : » nous sommes à mi-chemin de l’Europe et de l’Amérique et la fonte de la calotte glaciaire va améliorer encore notre emplacement stratégique en nous rapprochant de l’Asie. » Les Islandais se voient sur le chemin des futures voies navigables qui passeront par le grand nord quand la banquise aura fondu. Les écologistes apprécieront.
L’Islande, petit pays, indépendant depuis 1914 (région du Danemark avant cette date) et république depuis 1944, a, outre son désir d’autonomie la particularité d’être classé au premier rang des pays pour leur degré de pacifisme. Faut-il y voir un lien avec son rejet de l’Europe ? Plus facile direz-vous de maintenir un climat de paix dans un pays de 320 000 habitants perdu aux frontières du cercle polaire que dans un pays de 300 millions en climat tempéré ou tropical. C’est un fait. Ce classement établi par l’institut pour l’économie et la paix, n’en est pas moins intéressant à étudier.
Sur la base de 22 critères parmi lesquels le pourcentage de la population carcérale par rapport à la population, la militarisation, le nombre d’homicides pour 100 000 habitants, la facilité d’accés aux armes légères, le pourcentage du budget des Etats investis dans l’éducation etc… l’institut établit un classement. Un autre pays-île se classe dans une bonne moyenne, Maurice en 24em position ( sur 162), assez loin devant la France classée 48 eme.
On reviendra dans une prochaine actualisation du site sur ce palmarés du pacifisme qui place l’Islande et l’île Maurice, » nains politiques » à l’échelle mondiale, devant les grands pays de la planéte. Les USA sont classés 101em, la Russie 152 em, la France 48em derrière l’Uruguay, le Viet-Nam et le Chili. Small is beautiful … Les concentrations, le gigantisme, la tentation monopolistique conduiraient-elles le monde à sa perte ?
On doit s’interroger. Le constat fait par l’institut pour l’économie et la paix est que 2014 a été une année moins pacifique que les précédentes. Les conflits, le terrorrisme, le nombre de réfugiés et de personnes déplacées n’ont fait qu’augmenter. Les plus puissants, ceux qui se considèrent les gendarmes de la planéte qui devraient organiser la paix, attisent les incendies et ne donnent pas l’exemple du pacifisme dans leur propre société.
Alors bravo l’Islande, bravo Maurice qui dans leurs micro pays savent entretenir des relations humaines relativement apaisées. C’est donc possible, la Guadeloupe, décrite si violente, si instable, ne devrait-elle s’en inspirer ?
NDRL (1) Il s’agit d’un organisme basé aux USA et en Australie qui mesure le degré de pacifisme de 162 pays sur la planéte. En résumé, l’un de ses arguments est de dire que la guerre, la violence co ûtent bien trop cher en perte humaine et matérielle et que la paix serait bien plus propice au développement de l’économie dans des sociétés plus harmonieuses. A noter que les deux plus grands pays du monde les USA et la Russie sont très mal classés. Cherchez l’erreur !!