Une étude réalisée par le Pew research center (1) projette que d’ici 2050 le nombre de croyants affiliés à un courant religieux va augmenter sur la planéte. Les Chrétiens et les Musulmans seront les plus nombreux, presque à parts égales. Aux USA et en France, quasi exception, le nombre des athées devrait augmenter. Bref, les religions ne lâchent pas le monde.
Les guerres de religion, au nom de Dieu ou d’Allah, en fin de compte les mêmes, sont aussi vieilles que l’invention du monothéisme, quelque part là -bas sur les rives de la Méditerranée. Nous n’en avons pas fini avec les fous de dieu. Le XXI em siècle est bien parti pour être marqué du sceau de guerres de religions, contemporaines cette fois. De nouvelles croisades et de nouvelles St Barthélémy sont en cours. L’affrontement meurtrier entre sunnites et chiites au Moyen-Orient a des points communs avec les guerres meurtrières, auxquelles se sont livrés les protestants et les catholiques il y a plus de trois siècles. En ces temps obscurs, la France très catholique, sous le règne d’une monarchie absolue tuait ou envoyait aux galères, les protestants qui ne voulaient pas se soumettre. Il a fallu plusieurs révolutions, du temps et beaucoup de conscience pour sortir de cet obscurantisme. Des hommes et des femmes en 2015, en d’autres lieux, sont à nouveau confrontés à l’horreur mystico-guerrière. Leur appartenance religieuse ou leur athéisme les désignent comme ennemis aux yeux de fanatiques instrumentalisés.
« Le XXIem siècle sera religieux ou ne sera pas ». Hélas. Malgré les apparences, ce poncif n’est pas de Malraux, il s’en est défendu, il aurait plutôt dit que le XXIem siècle serait » mystique ou pas ». Quoiqu’il en soit on peut affirmer que ce siècle est d’ores et déjà guerrier dans les régions du monde o๠sont nées les trois religions monothéistes. Est-ce un hasard ?
Le passé, les leçons de l’histoire aurait pu favoriser la distanciation entre l’homme et les religions ou pour le moins laisser le spirituel et le religieux dans l’espace privé et séculariser toujours plus largement ce qui touche à l’espace public. Ce n’est pas ce qui se passe, le religieux revient au galop. Et si l’on en croit une étude prospective du Pew research center (1) ce n’est pas fini.
De cette étude un élément retient l’attention : » le nombre des athées, des agnostiques et des autres personnes non affiliées à une religion bien que croissant dans des pays comme les USA et la France, diminueront sur l’ensemble de la population mondiale … » Les religions ont de belles années devant elles, mais qu’en feront-elles ? De nouveaux champs de bataille ou un monde apaisé.
A l’exception des bouddhistes, si l’on en croit cette projection, les principales religions enregistreront une augmentation de leurs adeptes. Le déclin du bouddhisme, l’une des religions la plus pacifique de la planète, s’expliquerait par la baisse de la natalité en Chine, en Thaïlande, au Japon et par le vieillissement de la population dans ces pays. A retenir toutefois le nombre des bouddhistes, paradoxalement, augmentera en Europe, passant de 1,4 millions en 2010 à 2,5 millions en 2050.
Pour établir ces données, les chercheurs du Pew center ont analysé la taille et la répartition des principales religions dans le monde, les taux de natalité et de fertilité dans chaque pays, les migrations, les différences d’âges et les tendances aux conversions.
Avec la baisse du nombre des non-croyants et le déclin du bouddhisme, l’augmentation du nombre des musulmans est la donnée la plus significative de cette prospective. En 2050 les chrétiens et les musulmans seraient quasi à égalité démographique 31,4% de la population pour les premiers et 29,7% pour les seconds. Soit 2,9 milliards de chrétiens et 2,8 milliards de musulmans. Toutefois au cours des 35 années à venir et compte tenu de l’augmentation de la population mondiale (2) le monde chrétien progresserait de 35% et le monde musulman de 73%. Les courbes démographiques des deux religions se rapprochent, mais la poussée de l’Islam est plus importante.
Dans le même temps alors que la population mondiale augmente, les « non affiliés » à une religion passe de 16% de la population en 2010, à 13% en 2050. Une baisse significative à l’échelle planétaire, contredite dans quelques pays atypiques o๠les » non affiliés » composeront le groupe le plus nombreux, c’est le cas de la France, de la Nouvelle-Zélande et des Pays-Bas. Aux USA le nombre des « non affiliés » augmentera mais les chrétiens resteront largement dominants numériquement..
L’évolution des religions visibles mais moins importantes quantitativement, sera modeste: les hindous seront 1,4 milliards en 2050 contre 1 milliard en 2010 et les juifs 16,1 millions en 2050, progressant seulement de 2 millions.
En Inde les indous resteront majoritaires mais l’Inde comptera la plus importante population musulmane de tous les pays du monde, dépassant l’Indonésie. En Europe, les chrétiens seront majoritaires tandis que les musulmans représenteront environ 10% de la population.
Quant aux pays d’Amérique latine et de la Caraïbe, ils resteront chrétiens pour 89% de la population et les non-affiliés à une religion progresseront de 1%, ne suivant pas, sur ce point, la tendance mondiale.
Si l’on se projette au-delà de 2050, ce qu’a fait le Pew research center avec la prudence nécessaire, les donnnées et les paramètres étant fragiles sur une aussi longue durée, en 2100, dans le monde tel qu’il se dessine les deux principales religions, chrétienne et musulmane, se partageraient 70 % de la population de ce que sera le monde alors. Elles seraient donc en progression et toujours quasi à égalité, mais avec, cette fois, une avance de 1% pour l’islam.
Et Malraux, n’est plus là pour nous dire ce que sera le XXIIem siècle.
Quelle conclusion tirer de cette projection ? Aucune, la tendance exprimée confirme toutefois ce que nous voyons autour de nous. Une poussée des religions, d’une forme d’irrationalité et d’instrumentalisation de la spiritualité pas très rassurantes. En Guadeloupe un candidat aux prochaines élections régionales n’a-t-il pas déclaré qu’il se présenterait au nom de dieu ou poussé par dieu ? Mais que vient faire dieu dans cette histoire ? Enfin c’est ce que nous croyons!
Ailleurs dans le monde des partis politiques adossés à des obédiences religieuses se présentent et gagnent parfois des élections. D’autres massacres au nom de dieu. La séparation de l’église et de l’Etat, gagnée après plusieurs siècles de guerres et de révolutions, semble – encore – une évidence en France, mais elle ne l’est pas partout et de moins en moins, sur le reste de la planète. S’agit-il encore, d’un combat perdu ?
NDRL
(1) Pew research center est une organisation non gouvernementale fondée dans la deuxième moitié du XXem siècle par Joseph N Pew, un industriel américain, proche des républicains. Son credo est que la maîtrise du savoir et de la connaissance permet de solutionner les problèmes auxquels les hommes sont confrontés. Une vision très américaine, confiante dans le « génie humain et en particulier le » génie américain ». L’ONG fournit sur son site des informations – www.pewresearch.org – des données qu’il faut dans certains cas relativiser, voire critiquer, mais qui aide à comprendre le monde dans lequel nous sommes et vers lequel nous allons. Pour lire l’intégralité de l’enquête en anglais : www.pewresearch.org (2) La planète comptait 6,9 milliards d’habitants en 2010, elle en comptera 9,3 milliards en 2050.
(2) La population mondiale était de 6,9 milliards en 2010 elle sera de 9,3 milliards en 2050