Existe-t-il une alternative à l’extraction pétrolière ou bien les jeux sont-ils fait ? Au Canada, sixième producteur mondial, le pétrole contribue à la prospérité du pays. Les propos de Michel Lambert, dans le journal des Alternatives, donne un éclairage canadien et alimente le débat sur les enjeux de la découverte de pétrole en Guyane. Creuser à moins 6000 mètres, mais à quel prix ?
http://journal.alternatives.ca/auteur/michel-lambert
Le 20 juin, anticipant l’échec de la Conférence des Nations Unies de Rio 20, plus de 50.000 personnes prenaient les rues de Rio de Janeiro, au Brésil conjointement à des dizaines d’autres manifestations de par le monde. Ces mobilisations exigeaient des gouvernements et corporations impliqués dans la Conférence officielle, des solutions à mettre en place immédiatement pour contrer les changements climatiques et la dégradation de l’environnement terrestre. Mais davantage que la contestation, la grande marche populaire de Rio célébrait du même coup la tenue du Sommet des peuples pour la justice sociale et environnementale, une rencontresans précédent o๠notamment les politiques d’expansion extractivistes des gouvernements du Québec et surtout du Canada
furent décriées. Pour la centaine de québécois présents, il s’agit au retour d’être porteur de la vision du Sommet des peuples et de remporter ici des victoires contre ces politiques anti-environnementales, pour notre salut comme
pour celui du reste de l’humanité. Mais nous ne le ferons pas seuls.
Le mode de production extractiviste a pour objectif l’exploitation maximale des éléments de la nature qui sont commercialisables sur le marché mondial. Traditionnellement, on fait ici reférence à l’extraction de minerais et à la production de petrole, deux spécialités canadiennes. L’industrie extractiviste se base sur la dépossession du patrimoine commun.
Au Canada comme ailleurs ou les industries extractivistes sont l’oeuvre : les tragédies environnementales se multiplient, les communautés locales et autochtones sont spoliées, les législations qui visaient à protéger les écosystèmes sont démembrées, les droits démocratiques des personnes sont affaiblis, des politiques de privatisation se mettent en place pour favoriser les intérêts des transnationales et des industries de l’extractivisme et de l’énergie.
Et partout, cette course méne à plus de problèmes environnementaux et moins d’emphase immédiate sur les nécessaires à la crise environnementale.
Pire, devant la crise financière qui n’en finit plus, la tendance de nos gouvernements est tout simplement à plus d’extractivisme, plus de problèmes tant en amont qu’en aval et surtout, un refus total d’intégrer dans leurs analyses l’inimaginable chaos environnemental que nous léguerons à nos enfants.
Le Canada de Stephen Harper (1) est le parfait exemple de cette stratégie de course acharnée vers le grand vide, vers le profit immédiat sans considérations pour les conséquences. Le début et la fin de la stratégie économique canadienne tient à plus de pétrole produit des sables bitumineux. Mis à part peut-être celui de la sécurité, les Conservateurs sont prêts à risquer au bas mot tous les autres secteurs pour s’assurer du développement sans entrave du pétrole canadien ! C’est pourquoi le Gouvernement canadien injecte toujours prés d’un milliard et demi annuellement dans l’industrie. C’est aussi l’unique raison du retrait canadien du Protocole de Kyoto
C’est la l’essence de la nouvelle ouverture du Canada à la Chine. C’est la raison de la création récente d’un nouvel Institut canadien international pour les industries extractives et le développement alors qu’on ferme les institutions comme « Droits et
Démocratie ».
C’est le fondement des attaques ouvertes contre les organisations environnementalistes canadiennes et québécoises, contre quiconque en fait qui trouverait à redire de cette stratégie. Avec son Plan Nord, Jean Charest démontre qu’il est toujours un conservateur dans l’âme car l’extractivisme est aussi sa seule et unique carte.
A Rio, une mention toute spéciale, la seule du genre, fut faite au gouvernement du Canada en reconnaissance du rôle particulièrement néfaste de sa politique extractiviste nationale et internationale. Devant même les Etats-Unis, le Canada combat avec véhémence toute suggestion qui viendrait faire ombrage à l’utilisation des combustibles fossiles comme principale source d’énergie mondiale.
Cette « nomination » canadienne révèle clairement que la continuité du Sommet des peuples de Rio n’est pas un autre Sommet quelque part dans « l’ailleurs ». Si nous voulons être conséquent avec ces communautés chez nous et à l’étranger qui sont affectées par la politique canadienne, l’enjeu déterminant des prochains mois sera le travail que nous effectuerons ici, très précisément contre cette politique extractiviste, contre la production et la distribution des pétroles des sables bitumineux. Nos luttes ici sur ces questions auront un impact international.
Depuis quelques mois, des rencontres se tiennent à Montréal, Ottawa Toronto, Vancouver et ailleurs. D’autres sont prévues dans les prochaines semaines à St-John, à Calgary, à Winnipeg à l’ordre du jour, un constat partagé de part et d’autres sur l’urgence de construire de nouvelles alliances entre notamment les progressistes du Québec, du Canada et des Premières Nations avec, comme l’un des axes central, la question environnementale.
En novembre 2012, à Ottawa, une première assemblée de Fondation de ce nouveau Forum des peuples est prévue. Elle regroupera des individus et des organisations désireuses de sortir des carcans habituels, de briser les barrières historiques et d’unir nos forces contre les politiques de Stephen Harper.
(1) Stephen Harper, premier ministre canadien. Chef du parti conservateur, opposé au protocole de Kyoto. Son gouvernement a réduit les budgets d’évaluation environnementale.